Il y 100 ans, dans le diocèse d’Avignon : Mars 1915

3 mars 2015

Tout au long de ces chroniques, nous n’avons pour d’autre prétention que de cueillir quelques fleurs au gré des événements rapportés par la Semaine Religieuse de notre diocèse, rappelant l’histoire de ceux qui nous ont précédé, de ce qu’ils ont vécu, de ce qu’ils ont fait, de ce qu’ils ont été ; recueillant leurs souvenirs, leur témoignage, leurs expériences ; évoquant les figures marquantes, même modestes, de nos pères dans la foi ; nourrissant ainsi le cœur de notre esprit de famille.

C’est dans cet esprit, qu’à la suite d’un article sur l’abbé Marcel Bagnol, en novembre 2014, grâce à sa famille et à la diligence de l’abbé Charles-Bernard Savoldelli, nous avons pu retrouver une photo de lui en soldat.

Comment ne pas reconnaître dans les paroles de Mgr Latty, citant le Souverain Pontife, un enseignement d’une actualité troublante. En rappelant que le Royaume de Dieu est charité, cette charité qui est le cœur de l’enseignement évangélique et dont le pape affirme qu’elle sera « notre objectif et comme l’entreprise spéciale de notre pontificat ».

Mais il sent « son cœur de Père violemment déchiré » ; car il voit aussi « les haines de race qui sont portées au paroxysme et les rancunes qui divisent les peuples encore plus que leurs frontières ». Mgr Latty médite sur ces paroles dans une longue litanie introduite par ces mots « on ne saurait être indifférent et insensibles en face de barbares qui, systématiquement et par ordre, ont violé tous les droits et commis toutes les atrocités ».

 Il n’y a pas de complaisance dans le mal, mais on perçoit combien le pasteur de notre diocèse voudrait rendre compte de l’horreur et des atrocités engendrées par ces conflits. Il achève cette triste liste en condamnant ces barbares qui « sans scrupule et sans pudeur, ne cessent de couvrir du saint nom de Dieu leurs œuvres de rapine et de meurtre, eux qui bouleversent l’ordre et le paix du monde, cet ouvrage de Dieu ; eux qui foulent aux pieds le droit, la liberté, l’honneur, ces dons de Dieu ; eux qui brûlent les églises de Dieu, outragent les vierges consacrées à Dieu ! ». Il conclue enfin tout son propos en rappelant à chacun le devoir de vivre en communion, en laissant de côté les « dissensions et (les) discordes entre les catholiques eux-mêmes ».

Au fond de la place Pignotte, en prenant la rue Paul Saïn, nous nous trouvons la belle façade de la chapelle de Notre Dame de Conversion ou de la Congrégation des Hommes. Cette chapelle fut construite par le maçon François Lamy, puis Esprit-Antoine Rochas (1751-1753). C’est dans cette chapelle que chaque dimanche une messe est « spécialement réservée MM. Les militaires ». Le 7 mars 1915, pour le III° Dimanche de Carême, Mgr l’Archevêque y présida la messe et adressa la parole aux soldats. Après leur avoir dit tout son attachement et la reconnaissance de chacun, commentant les paroles de l’Evangile « heureux ceux qui écoutent la parole de Dieu et qui en font la règle de leur conduite », il les met en garde contre l’esprit de mensonge, à cet esprit du mal, à ce redoutable ennemi qui nous tente de toutes manières, en particulier par les mauvais exemples ou les suggestions perfides de ceux qui le suivent, et par les séductions variées qu’il sème sous nos pas. » Et il semble bien que Mgr l’Archevêque ait, au moins, prêché pour cette messe, chaque dimanche jusqu’aux Rameaux.

Ce mois de mars sera aussi marqué par la fermeture du Petit Séminaire à cause d’un « cas presque foudroyant de maladie infectieuse », pour éviter toute contagion. Par ailleurs, le Petit Séminaire est aussi réquisitionné pour abriter des réfugiés.

Abbé Bruno Gerthoux
Archiviste Diocésain