Il y a cent ans dans le diocèse d’Avignon - Novembre 1918

1er novembre 2018

Te Deum d’action de grâce

Le numéro 19 du bulletin du Diocèse d’Avignon est daté du 17 novembre 1918. Nous pouvons bien comprendre combien cette date de novembre 1918 dut être importante, et elle le fut. L’archevêque d’Avignon écrit une lettre à tous les curés pour leur demander de célébrer un Te Deum d’action-de-grâces à l’occasion de la Victoire totale de la France et de ses Alliés.


Le Te Deum est une hymne qui date du IV° ou V° siècle, et qui est utilisée dans la liturgie (en particulier le dimanche et les solennités au bréviaire) mais aussi pour des circonstances plus solennelles lors d’une victoire, d’une fête nationale ou plus simplement à la fin d’une année.

«  Dieu a bénit nos armes, et leur a donné la victoire. Les Barbares sont abattus et réduits à merci. Un armistice, signé le lundi 11 novembre, à 5 heures du matin, a mis fin aux hostilités. - Justice est faite  ».

Le pasteur poursuit :

«  Soyons donc tout à la joie et à l’enthousiasme : rien n’est plus légitime après quatre ans, et plus, de la plus épouvantable et de la plus meurtrière des guerres (...)Soyons reconnaissants envers Dieu, et offrons-lui de solennelles actions de grâces.  ».


Pour autant, l’archevêque, dans l’enthousiasme de la victoire, demeure réaliste :

«  ne nous faisons pas illusion  ; nous ne sommes pas encore au bout de nos peines, et la France aura encore bien des difficultés à surmonter pour reconstituer sa vie normale, et assurer sa pleine sécurité.  »

et d’ajouter : 

«  prions-le qu’il suscite, parmi nous, des hommes sages, probes, énergiques, qui soient capables d’un si grand et si nécessaire ouvrage. Il nous a donné des hommes de guerre qui ont conduit la France à la plus belle et à la plus puissante des victoires : demandons-lui de nous envoyer des hommes de paix, qui puissent et veuillent la raffermir dans cette union sacrée, profonde, vraiment fraternelle d’où les peuples tirent leur force, leur honneur et leur prospérité  ».


Le Te Deum, selon les prescriptions de Mgr Latty, sera chanté dans toutes les églises et chapelles le dimanche 17 novembre, en sonnant les cloches. Ensuite, le psaume De profundis sera prié pour les défunts de guerre.

«  Les autorités civiles et militaires sont invitées à cette cérémonie, et des places spéciales leur seront réservées  »

.

L’abbé Bourdoncle

Ironie du sort, le même 11 novembre, monsieur l’abbé François Bourdoncle, curé de Croagnes, trouvait la mort accidentellement.
Il était né le 4 mars 1880 à Mauron, dans l’Aveyron. Il avait commencé ses études ecclésiastiques dans le diocèse de Rodez, mais sa santé précaire lui imposa de trouver un lieu au climat plus doux. L’un de ses compatriotes étant supérieur du Grand-Séminaire d’Avignon, il lui écrivit et fut admis au Grand-Séminaire d’Avignon. Il fut ordonné prêtre le 29 juin 1905, et quelques jours après rejoignit la paroisse de Gordes comme vicaire. 

«   Il n’y fit que passer, mais il y laissa le souvenir d’un prêtre actif, zélé et plein de modestie  »

. En février 1907, Mgr l’Archevêque lui confia la paroisse de Croagnes – sur la commune de Saint-Saturnin-lès-Apt. C’est à ce poste qu’il fut appelé pour rejoindre les rangs de l’armée.

Monsieur le chanoine Jules Bonnel

Jules-Joseph Bonnel naquit à Malaucène le 16 octobre 1841, d’une famille qui donna à l’église un autre fils prêtre. Sa ferveur se dévoila très tôt, de mémoire de famille on raconte qu’un soir ses parents le cherchaient, ne sachant où il était. Ses camarades s’en étonnent :

«  Comment, leur disent-ils, vous ne le savez pas  ? Mais il est à l’église  ; il y va tous les jours  ».



Il fut ordonné prêtre le 23 décembre 1863, et commença son ministère par l’enseignement au Petit-Séminaire d’Avignon :

«  ses élèves écoutaient ses leçons avec un véritable charme  »

. Il composa beaucoup : études en prose, dialogues en vers, cantates triomphales sur des musiques composées par G. F. Imbert ou le Père Chassang, saynètes.

Après le conflit de 1870, il fut chargé de prendre soin, avec MM Delor et Martin, les blessés militaires recueillis à l’archevêché. En novembre 1873, il fut nommé vicaire aux Carmes, puis à Saint-Didier en 1874 et enfin à Saint-Agricol en 1878. Il est aussi chargé de l’aumônerie du Lycée. En 1879 il est fait chanoine honoraire.

En octobre 1883, il quitte Avignon pour aller rejoindre son frère prêtre à Saint-Sulpice, à Paris, jusqu’en 1884 où il devient recteur de la paroisse de Lacoste. En novembre 1889 il est nommé recteur de la paroisse de Robions (sic), où

«  il a le bonheur de se trouver dans le pays même du Père Xavier de Fourvieres qui reveille heureusement sa verve poétique  »

. C’est pour les élèves de son école libre qu’il compose de ravissantes pastorales.


Affaibli dans sa santé et ses capacités, il propose sa démission en 1907. N’entendant plus, y voyant à peine pour se conduire, ne plus, à la fin, s’exprimer qu’avec difficulté, il se consolait de son affreuse solitude en allant tenir compagnie au Jésus, toujours si tendrement aimé, dans (la) chapelle des Pénitents Gris.

Abbé Bruno Gerthoux